Derniers mots...

Notre aventure s’arrête, 15 jours avant la date prévue, alors c’est les temps du retour, des comptes et des comptes-rendus, du débrief avec les membres de l’équipe de Seuil qui sont quand même déçus que mister L. n’ai pas eu la volonté d’aller jusqu’au bout. Alors pour lui pas de retour glorieux mais juste une dernière réunion avec l’équipe encadrante et sa famille...

... De mon côté, malgré son attitude passive qui m’a souvent agacé, je suis très heureuse (et un peu fière) d’être partie il y a plus de 2 mois avec un jeune un peu perdu, immature et maladroit, d’avoir fait avec lui plus de 1200kms à pieds, et de revenir avec un jeune homme plus sûr de lui, plus débrouillard et plus réfléchi.

Les leçons que nous avons chacun reçues sur le chemin sont maintenant en nous et vont sûrement continuer de résonner pour longtemps.

Derniers pas...

Notre date de retour étant fixée et comme nous faisons nos derniers pas sur le chemin, je souhaite qu’avec Mister L. nous relevions le défi proposé par l’association: faire plus de 50kms en une étape.

 Il accepte ce dernier challenge avec moi et nous partons à 7h du matin en direction de Salamanque !

 

Nous avions décidé d’aborder cette longue marche de façon très tranquille et nous avons cheminé paisiblement en nous arrêtant régulièrement pour nous reposer.

Cette marche aura été la plus intense mais surtout la plus enseignante de toute et Mister L. était très fier d’avoir relevé ce défi avec autant de facilité.

Nous sommes arrivés à l’auberge de Salamanca à 20h30...

... où nous sommes accueillis chaleureusement par un couple de français. Merci les Daniel !

Quand on arrive dans le désert...

On quitte les montagnes et tout d’un coup notre paysage est fait des terre rouge et de grandes lignes droites...

On découvre les bodegas, ces étonnantes petites maisons en terre cuite, enterrées, qui composaient avant des villages entiers.

On visite les ruines des cités médiévales fortifiées et les églises romanes où nichent les cigognes...

Et on est accueilli dans des auberges qui ont su garder l’esprit de l’hospitalité du camino ! Ici  la nourriture est offerte et partagée avec tous les pèlerins. Et le service est donativo, c’est à dire qu’on donne ce que l’on veut (ou peut).

Et on reprend notre route... 

Chemins croisés

Au bar d’un petit village, nous avons croisé la route de Françoise, une française qui marche seule. On discute un peu et nous décidons de dîner ensemble pour continuer à se raconter nos aventures du chemin. Françoise a marché depuis Séville, soit près de 800kms, à des températures de plus de 40 degrés parfois ! Une fois, sur autre chemin (car elle en a fait beaucoup d’autres) elle a même croisé 2 loups ! Pendant la discussion on en vient à parler de la guerre, encore très présente ici dans les paroles des anciens, et elle me dit avoir aussi été marqué par la guerre.Alors je me demande quel âge elle peut avoir et je me risque à lui demander. Elle me répond en souriant: « j’ai 83 ans et bien tassés en plus ». Avec Mister L. on en revient pas. Quel rencontre encore sur ce sacré chemin !

Et le lendemain au détour d’une église, une dame nous invite à entrer. Elle parle français couramment et nous dit que sa fille est en train de travailler à la restauration de retable à l´intérieur de l’église et que le bâtiment est remarquable. « Une des églises les plus remarquable de Sanabria » nous dit-elle. Alors je lui demande pourquoi elle parle si bien français et elle nous raconte que pendant la guerre sa famille a émigré en France, elle a donc été un peu à l´école française. Mais à l’arrivée de la seconde guerre mondiale ils sont revenus en Espagne, et avant son mariage elle a travaillé comme institutrice pour des riches familles madrilènes. Elle nous raconte que dans les années 50/60 c’etait à la mode dans les riches familles de Madrid d’avoir des institutrices françaises ou des « fraulein » pour apprendre l’allemand aux enfants... Maite (María Teresa) est née en 1936 et elle a donc aussi 83 ans !

Paysages

Nous voilà repartis à travers les paysages magnifiques et mystérieux de la Galice profonde. 

Pour Marie

Et les rencontres dans les  petits villages que nous traversons sont toujours aussi étonnantes et riches .

2 mois...

Ça fait 2 mois maintenant qu’on marche tous les jours en moyenne 20 kms ... et malgré la décision de Mister L. d’arrêter la marche bientôt on est toujours en chemin et ... dans les meilleures conditions !

Tous les 10 jours nous avons une journée de repos sans marche et je dois rendre un rapport très détaillé à l’association. Dans ce rapport je dois rendre compte de ce que nous faisons chaque jour, de l’évolution de la marche et de mes impressions sur le jeune.

Puis il  est lu et commenté par le jeune avant d’être envoyé.

D’habitude je suis plutôt bienveillante avec Mister L. dans mes rapports, et je met l’accent sur les évolutions positives. Mais au vue de son attitude des derniers jours je décide de ne pas le ménager et j’écris un rapport plutôt incisif (mais objectif) à son sujet. 

Résultat: dans son commentaire il se défend car il se sent attaqué,

mais dès le lendemain, changement radical d’attitude !

Nous passons les ponts de la ville thermale d’Ourense et ...

... sans que je lui demande il marche maintenant en tête chaque jours et nous guide du mieux qu’il peut ! 

C’est un plaisir pour moi de le voir profiter comme ça de ces moments précieux (qui sont peut-être les derniers) et de partager avec lui de nouvelles aventures sur le chemin dans une ambiance super détendue !

On continue...

Mister L. confirme son envie de rentrer mais en attendant la décision du juge il décide de continuer à marcher avec moi. Alors on quitte Santiago pour suivre le chemin du sud en direction de Séville mais... à l’envers cette fois, donc plus de fléchage pour se repérer ! J’avais décidé de le faire marcher seul et d’avancer de mon côté pour me permettre de réfléchir, mais je le retrouve au bout d’une heure car il s’est complètement perdu (et de mon côté j’ai pas mal hésite aussi). Alors finalement nous reprenons la route ensemble et nous devons beaucoup nous parler et nous entraider pour éviter de se perdre à nouveau. Le chemin continue de nous étonner par la force des obstacles ou des rencontres qu’il met sur notre route ... “la magie du chemin” (!?)

Plage, ciel bleu, sunset, mouettes et... lassitude

On passe par Muxia après deux jours de marche très courte.

La ville est magnifique mais Mister L. qui entrevoit la possibilité d’arreter la marche (possibilité de retour dans sa famille le 21) passe ses journées à lire et à dormir. Il reste respectueux mais il se traîne derrière moi comme aux premiers jours. C’est décourageant et j’aurais envie de le secouer un peu mais les conseils de ma hiérarchie sont toujours de rester distante et  de le laisser avec sa décision. Difficile et lassant...

De retour à Santiago en attendant le verdict du retour...

Hommage aux amis et aux rencontres du chemin...

MERCI les amigos du Camino d’avoir partagé avec moi vos histoires, les moments de joie et d’efforts, de m’avoir soutenu et donné de la force dans les moments de doutes...

MERCI Andreas, Karine et ses enfants, Padre Ernesto, Laure, David, Udo et Helena, Laurencia, Rainir, Émeline, Mathieu et leurs enfants, Mar, Moncho, Sandrine, Ludovic, ma petite « Venga », Carmen, nos copains Mathilde, Mads et Tom ! Lucie, Elizabeth, Mickaël, Martina, Miguel, Helena, Ifa, Jas et tous les autres...

BUEN CAMINO ;-)

Fisterra: célébrations du bout du monde

Sur la plage de Fisterra on assiste à un superbe coucher de soleil et lever de pleine lune.

Et pour marquer notre passage au km 0 du Camino et célébrer notre arrivée au bout du monde (dans la tradition des rites païens;-) chacun se fait couper les cheveux par un autre et on jète tous un vêtement porté sur le chemin dans le feu. 

(King of Spain by Tombolo)

Mister L. décide de se raser la tête et brûle le t-shirt (de son école) qu’il porte depuis le début du voyage !

Nouveau départ ?